« LE NETTOYAGE ETHNIQUE
DE LA PALESTINE » :
Sur une population
largement sans défense. Aujourd’hui le nœud
gordien de ce conflit réside dans
le concept de paix de chacune des parties :
les Palestiniens veulent la paix mais aussi que leurs droits soient respectés,
c'est-à-dire : « la paix par le droit ». Les Israéliens
veulent la paix par : « l’arrêt des hostilités » le droits des Palestiniens est secondaire, on
verra cela après ! Aujourd’hui,
croire, faire croire ou laisser croire, que sans une intervention légale, la
paix est possible c’est faire abstraction
des dogmes sionistes.
ILAN PAPE
Dans
le Nettoyage Ethnique de la Palestine il y a eu les :
Campagnes vengeresses : 15
mai 1948 (I)
Le succès n’a pas été sans limites, cependant.
Il y a eu, inévitablement, des problèmes dans le galop effréné des opérations israéliennes,
et un prix à payer pour gérer simultanément le nettoyage systématique de la
Palestine et l’affrontement avec les armées régulières arabes qui commençaient
a entrer dans le pays à la mi-mai 1948. Les implantations isolées ont été
laissées en situation vulnérable - dans
le Sud face aux troupes égyptiennes, qui en ont occupé plusieurs, mais pour
quelques jours seulement, et dans le Nord face aux troupes syriennes, qui en on
pris trois, pendant quelques jours également. L’envoi fréquent de convois à
travers des zones arabes très peuplées et non encore prises a occasionné
d’autres sacrifices : certains de ces convois ont été attaqués avec succès
et plus de 200 soldats juifs ont été tués.
À la suite d’une de ces attaques, qui visait un
convoi se dirigeant vers l’implantation juive de Yechiam, à l’extrémité
nord-ouest du pays, les soldats qui ont mené plus tard des opérations dans
cette région se sont montrés
particulièrement durs et vindicatif dans la façon d’accomplir leur mission.
L’implantation Yechiam se trouvait à plusieurs
kilomètres au sud de la frontière occidentale de la Palestine avec le Liban.
On a dit expressément aux soldats juifs
participant aux attaques de villages de l’opération Ben-Ami, en mai 1948, que
leurs objectifs devaient être anéantis pour venger la perte du convoi. C’est
ainsi que les villages de Sumiriya, Zib, Bassa, Kabri, Umm al-Faraj et Nahr ont
été soumis à une version aggravée, plus cruelle, de la procedure
« détruire et expulser » des unités israéliennes : « Notre
mission : attaquer pour occuper, […] tuer les hommes, détruire et mettre
le feu à Kabri, Umm al Faraj et Nahr. »
Le supplément d’ardeur ainsi inspiré aux
troupes a produit l’une des opérations de dépeuplement les plus rapides dans
l’une des régions arabes à plus forte densité démographique de Palestine.
À
vingt neuf heures de la fin du Mandat britannique,
presque tous les villages des districts du nord-ouest de la Galilée - qui
se trouvaient tous sur le territoire dévolu aux Arabes, par l’ONU – avaient
été détruits, ce qui permit à Ben Gourion
content de lui d’annoncer au Parlement fraîchement constitué :
« La Galilée occidentale à été
libérée » (certains villages du nord de Haïfa n’ont été en réalité été
occupés que plus tard). Autrement dit, il n’avait fallu aux troupes juives
qu’un peu plus d’une journée pour transformer un district peuplé de 96% de
Palestiniens et de 4% de juifs - avec
des proportions comparables pour la propriété des terres - en une zone presque exclusivement juive. Be,
Gourion était particulièrement satisfait de la facilité avec laquelle on avait
expulsé les populations des gros villages, comme Kabri, qui comptait 1 500
habitants, Zib, qui en comptait 2 000, et le plus important, Bassa, où
vivaient 3 000 personnes.
Campagnes
vengeresses : 15 mai 1948 (II)
Il fallut plus d’une journée pour vaincre
Bassa, en raison de la résistance de ses miliciens et de quelques volontaires
de l’ALA. Si l’ordre d’être particulièrement dur avec ce village pour se venger
de l’attaque contre le convoi de Yechiam ne suffisait pas, sa résistance a été
perçue comme une autre raison de « punir » le village (c’est-à-dire faire plus qu’expulser sa population). Les
villages qui se révélaient difficiles à soumettre devaient être
« sanctionnés ». Comme pour tous les traumatismes dans la vie des
êtres humains, certaines des pires atrocités restent gravées en profondeur dans
la mémoire des survivants. Les membres des familles des victimes ont conservé
ces souvenirs et les transmise d’une génération à l’autre.
Nizar al-Hanna appartien à une de ces familles,
dont les souvenirs reposent sur les scènes traumatisantes qu’a vécues sa
grand-mère :
Ma grand-mère maternelle
était une adolescente quand les troupes israéliennes sont entrées dans Bassa et
que tous les hommes jeunes ont été alignés devant l’une des églises et
exécutés. Ma grand-mère a vu la Haganah exécuter deux de ses frères - l’un avait vingt et un ans, l’autre vingt
deux, et il venait de se marier.
La destruction totale qui a suivi le massacre a
épargné une église où priaient les chrétiens orthodoxes grecs du village ainsi
qu’un sanctuaire musulman à coupole qui servait à l’autre moitié de la
population. On peut encore apercevoir aujourd’hui quelque maison entourée de
barbelés dans un champ en friche, expropriée au bénéfice de citoyens juifs. Le
territoire du village était si vaste (25 000 dounoums, dont 17 000 étaient
cultivés) qu’il comprend actuellement une aéroport militaire, un kibboutz et
une ville nouvelle. Le visiteur attentifs ne peut pas ne pas remarquer les
vestiges d’un système complexe d’adduction d’eau qui faisait la fierté des
villageois : il venait d’âtre terminé quand l’endroit à été rayé de la
carte.
L’expulsion de tant de villageois - ex-citoyens du Mandat britannique que la
résolution de partition des Nations unies venait de transformer en citoyens
soit de l’Etat arabe prévu, soit de l’Etat juif - est passée inaperçue à l’ONU. En dépit de
l’événement spectaculaire qu’était le retrait britannique et de l’accord
potentiel que représentait l’envoi par le monde arabe d’un corps
expéditionnaire en Palestine, la dynamique du nettoyage ethnique s’est poursuivie
sans interruption. Les dirigeants de l’Etat d’Israël fraîchement crée - encore en gestation – et ses chefs
militaires savait qu’ils avaient les forces suffisantes à leur disposition pour
arrêter les unîtes arabes tout en continuant à nettoyer inlassablement le pays.
Il était évident aussi qu’au cours du mois
suivant les capacités des forces juives allaient atteindre de nouveaux
sommets : au début juin, les ordres envoyés aux troupes étaient encore
plus ambitieux, tant par leur envergure géographique que par l’importance du
quota de villages que chaque brigade avait désormais pour mission de prendre et
de détruire.
Le commandement général arabe, lui, perdait
prise rapidement. Les généraux égyptiens
avaient fondé leurs espoirs sur leur aviation, mais les appareils qu’ils
avaient envoyés pendant la seconde quinzaine de mai - période cruciale – avaient échoue dans la
plupart de leurs missions, sauf pour quelques raids sur Tel-Aviv. En juin, les
forces aériennes d’Egypte et des autres pays arabes avaient d’autres
préoccupations ailleurs, car leur mission principale était de protéger les
régimes arabes et non de contribuer au sauvetage de territoires palestiniens.
Source ILAN PAPPE Historien Israélien (FAYARD)
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